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BALLON AU POING. (UNE NOUVELLE ECRITE SUR LE THEME DE NOTRE BEAU JEU TRADITIONNEL.) « J'AI REVE DE BALLON AU POING. »...
Il y a quelques jours, j'ai eu l'occasion en partant de Morlancourt où je venais de visiter ma mère, de me rendre à Hérissart, saluer un ami ballonniste. Y a-t-il un rapport de cause à effet avec le songe que je vais raconter maintenant !
La nuit suivante, j'ai rêvé. J'ai rêvé que Fernand Vaquez, mon ancien instituteur à l'école primaire de Morlancourt me demandait d'écrire sur le ballon au poing. Une rédaction sur le ballon au poing !
Mon maître d'école était originaire d'Hérissart, haut-lieu du jeu de ballon, je n'avais donc vraiment pas intérêt à raconter des sottises. D'autant qu'il tenait à ce que le texte comporte des expressions typiques du ballon au poing, qu'il soit vivant, illustré par la description des gestes des ballonnistes, compréhensible par tous.
Il fallait parler des quinze, des trente, des chasses…etc.
Un peu à la manière dont le ferait un journaliste ou un reporter.
Quel programme ! Comment allais-je m'y prendre ? Moi qui accompagnait mon père et mon grand-père tous les dimanches d'été, sur les places de Ville sur Ancre, Buire sur Ancre, Treux ou encore Ribemont sur Ancre ! Et bien sûr à la fête d'Albert, le premier dimanche d'août et, apogée de la saison, à La Hotoie le 15 août !
En ce temps là, au tout début des années soixante, La Hotoie était un nom prononcé avec tant de considération et d'importance que j'étais persuadé, avec la perception de mes dix ans, qu'il s'agissait sûrement d'une grande ville, un lieu mythique célébré par les ballonnistes, tout à côté d'Amiens !
Pour revenir au devoir d'écriture, certes le jeu de ballon me passionnait mais quant à le décrire dans une rédaction !
Mais je vénérais Monsieur Vaquez et j'allais tout tenter pour ne pas le décevoir.
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Quelques phases d'une partie de jeu de ballon, le déroulement du premier jeu…
La place du village, bordée de vieux tilleuls récemment élagués est bien ensoleillée. La veille, le sol en terre battue a été débarrassé des mauvaises herbes par les jeunes. Le matin, les anciens avaient ressorti les sacs de craie blanche pilée pour tracer les lignes du tir et de la corde et celles autour du terrain.
Le cadre convenait parfaitement pour accueillir le concours de ballon de ce dimanche de mai.
C'est au foncier de l'équipe qui a bénéficié du tir d'effectuer le premier livrage et donc, d'engager la partie. Le joueur réalise une superbe livrée qui va obliger le foncier adverse à un puissant rachas au bond à moins que son basse-volée, peut-être mieux placé, ne décide de reprendre la balle d'une splendide volée.
Le ballon revient, le premier foncier, bien campé sur ses jambes pour une reprise au bond, s'emploie à casser rageusement le ballon qui fait un premier bond dans le terrain juste avant de sortir des limites. C'est à cet endroit précis que le poseur de chasses va planter le premier piquet, le rouge, indiquant ainsi où se situe la première chasse !
Nouveau livrage avec un ballon fuyant au dessus de la corde, provoquant un geste maladroit du cordier gauche de l'équipe d'en face, le ballon touche successivement son avant-bras et sa jambe : quinze pour le tir ! Le joueur pas assez serré, se fait quelque peu gronder par la galerie.
La balle au tir pour la troisième fois. Belle livrée bas-et-raide qui arrive cependant plein poing sur le basse-volée droit de la formation opposée. Avec beaucoup de chance, la bande mal ajustée s'échappait du poignet, le joueur la renvoie à ras de terre, elle roule quelques bons mètres avant qu'elle ne soit stoppée par l'autre milieu de corde. Le
marqueur accourt le long du terrain et indique au poseur le point précis sur lequel la seconde chasse, la bleue sera posée.
Les deux chasses établies, l'arbitre invite les deux équipes à traverser. On change de camp, les joueurs du fond viennent du côté du tir et inversement, ceux de l'autre équipe prennent leur place au fond du jeu.
Pour l'information des douze joueurs mais aussi celle des spectateurs, l'arbitre avait pris soin auparavant d'annoncer haut et fort la marque : « quinze au fond en traversant, on joue les deux chasses ! »
Tandis que le poseur se place juste au niveau de la corde pour vérifier que le livreur enverra le ballon au-delà de cette ligne ou que son pied ne franchira pas la ligne de tir, l'arbitre, lui se positionne au niveau de la chasse rouge, en criant presqu'à tue-tête, « la première est à moi ! »
Au tour du foncier de la seconde formation de livrer. Un impératif s'ajoute à l'obligation de franchir la ligne de corde, c'est-à-dire de ne pas livrer en dessous, celui d'envoyer le ballon au-delà de la première chasse, celle qui se trouve dans son jardin, selon une expression familière souvent entendue. C'est chose faite sans problème, au terme d'un très long livrage, le foncier adverse, trop avancé, ne parvient pas à reculer suffisamment et ne peut renvoyer le ballon au dessus de la chasse qui est alors perdue pour les siens : « quinze à ! »
Les joueurs évoluant au fond vont devoir se montrer vigilants, les cordiers être bien serrés juste derrière la deuxième chasse, la bleue qu'il leur faut absolument gagner.
Au tir, trop confiant, pas assez concentré, le foncier livre dehors, directement : trente au fond, quinze au tir ! Il n'y a plus de chasse.
Nouveau livrage. Au tir, plus appliqué le foncier propulse le ballon bien au-delà des basses-volées opposés, l'autre foncier prend du fond, bien décidé, en cas de retour trop faible, à ne pas se faire bourrer par le milieu de corde de la formation rivale, le ballon après un rebond bien anticipé, repart avec une puissance peu commune.
En face, il faut toute la force et la précision du basse-volée, venu suppléer son foncier qui avait un peu trop reculé en prévision d'un très long rachas, pour expédier le ballon par-dessus, derrière la ligne de
fond, au grand dam du foncier incapable de reprendre ce coup de volée de plus de cinquante mètres ! Trente à deux !
Quelle partie fort disputée ! Des applaudissements nourris fusent de part et d'autre des bancs des supporters respectifs qui assistent à du très beau jeu, tous les coups sont joués à fond, les beaux gestes servent le jeu, ils ne sont pas exécutés « que » pour la galerie ! La galerie ne manque pas d'encourager ses préférés et laisse échapper des termes que l'on entend qu'ici, autour des ballodromes : Prends du fond ! Fais serrer ta corde ! A la volèe ! En dessous ! Par-dessus ! Dehors ! Tu vas te faire bourrer ! Faut traverser ! Y a plus de vent ! A la chasse ! Elle est bonne pour les deux ! Un beau jeu à remonter ! Ne pelote pas avec lui ! Serrez, bon sang, serrez ! Casse dans la corde ! Autant d'expressions singulièrement liées à l'ambiance conviviale régnant dans le public !
On est donc à trente partout, pas de chasse et pour la troisième fois au tir, le foncier va livrer. Le ballon effectue une trajectoire basse, énergique qui certes n'arrivera pas au fond, mais dans le trou, l'espace situé entre le foncier et les deux basses-volées, sûrement trop serrés. Un bond dedans, le ballon est repris mais retombe à l'extérieur, le point est pour le tir, quarante –trente, la chasse du jeu à poser !
Quatrième livrage, le ballon prend de la vitesse mais le cordier adverse, attentif, le reprend en visant les pieds du milieu de corde. C'est sans compter sur la subtilité de ce dernier qui ne se laisse pas surprendre et d'un coup sec et nerveux fait faire un bond au ballon à quelques mètres devant lui, avant qu'il ne sorte du terrain.
Chasse du jeu posée, on traverse sur la marque de trente-quarante et on va livrer pour le gain de la chasse. Si le tir prend le point, on revient à quarante à deux, dans le cas contraire le premier jeu ira à l'équipe du fond.
Menant au score, le foncier s'apprête à livrer pour la seconde fois dans ce premier jeu. Décontracté mais fin observateur, il avait remarqué précédemment qu'en face, le cordier droit était parfois distrait. Alors, faisant mine de regarder loin devant lui, il dupe tout le
monde avec sa livrée, il file, c'est-à-dire qu'il expédie la balle au ras du sol, la balle maligne terminant sa course sur les chaussures du cordier. Absence d'attention de sa part, tentant désespérément une reprise du pied, le malheureux cordier amortit malencontreusement le ballon qui lui reste collé aux pieds! Jeu ! Un à zéro.
Jeu suivant, au premier basse-volèe de livrer.
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A la fin de mon rêve, j'ignore ce que Monsieur Vaquez a pensé de ma rédaction. Si j'écris parfois aujourd'hui ou plutôt si j'apporte mon témoignage par écrit, c'est à lui que je le dois.
Je ne me livrerai pas à une profonde étude des rêves (l'onirologie), trop complexe pour moi. Mais si jamais il existait aussi un lien entre mon maître d'école et l'intérêt manifeste que je porte au ballon au poing !
Si quelques lectrices ou quelques lecteurs ont pris un peu de plaisir à lire « ce que j'ai vu au cours du premier jeu de la partie de ballon », ce serait là un bel hommage de remerciement que j'aurais adressé cinquante cinq ans plus tard à mon maître d'école.
Gilles CARON
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